Salut Jean

Salut Jean

Messagepar Jean-Claude Carton » Sam 13 Mars 2010 17:58

Je sors de ma réserve quelques instants.
Jean est parti au Paradis des Hommes en colère....
Repose toi Jean; aujourd'hui, je suis orphelin quelques heures; j'aurai bien aimé être d'antenne cette nuit malgré les "bobos" physiques...
Je t'avais rencontré en 1962; j'étais môme et je n'ai jamais oublié tes conseils.
Tu vas surement te fendre la gueule avec Léo, Georges, Jacques et ceux qui ont pigés que nous étions des gros c....ici bas.
Fumes, bois, mange et bisous à Christine !
A bientôt Camarade !

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La montagne ne sera plus jamais aussi belle. Le chanteur Jean Ferrat, décédé samedi à 79 ans. Artiste engagé, au service de tous les combats pour la fraternité, la révolte et l'idéal communiste, il était également un poète fou d'Aragon, qu'il a interprété avec talent. Il était l'auteur-interprète et compositeur de quelques 200 chansons.
Né le 26 décembre 1930 à Vaucresson (Hauts-de-Seine), Jean Ferrat, né Jean Tenenbaum, a 11 ans lorsque son père, juif émigré de Russie, est déporté. L'enfant est sauvé grâce à des militants communistes, ce qu'il n'oubliera jamais. A la Libération, il quitte le lycée pour aider sa famille, et devient aide-chimiste jusqu'en 1954. Il décide alors de passer ses premières auditions dans des cabarets parisiens.
Après avoir écrit la musique des «Yeux d'Elsa» (1956) pour André Claveau, il chante régulièrement à «La Colombe», puis fait sa première grande scène à l' Alhambra en 1961 où il triomphe avec «Ma môme», et «Deux enfants au soleil».
Rapidement, Jean Ferrat choisit d'interpréter des textes plus engagés, comme Nuit et Brouillard (1963), non diffusée par les radios, puis Potemkine (1965), interdites d'antenne. Compagnon de route du PCF, sans jamais en avoir été membre, il affirme haut et fort ne pas être un «béni-oui-oui» du parti. Ainsi ses chansons Camarade qui dénonce l'invasion russe de Prague en 1968, ou Bilan (1980) qui fustige la déclaration de Georges Marchais sur le «bilan globalement positif» des pays de l'Est.
En 2007, Jean Ferrat s'était prononcé en faveur d'une candidature de l' altermondialiste José Bové comme représentant d'une gauche antilibérale pour l'élection présidentielle. Son dernier engagement politique était dans le cadre de la campagne des élections régionales le soutien de la liste du Front de Gauche en Ardèche.
Réticent à passer à la télévision

A la scène, qu'il quitte après un passage au Palais des sports en 1972, il préfère son Ardèche d'adoption, qui lui inspire «La Montagne», l'un de ses plus grands succès. En 1974 et 1995, Jean Ferrat consacre avec succès deux albums à Louis Aragon dont il met les textes en musique Que serais-je sans toi et Heureux celui qui meurt d'aimer
Réticent à passer à la télévision, le chanteur sort d'un long silence en 2003, pour l'émission Vivement Dimanche. Il y défend ses deux passions, la chanson et la politique, s'insurgeant notamment contre la grande industrie du disque qu'il estime dangereuse pour la liberté de création.

Jean Ferrat, qui a été marié à la chanteuse Christine Sèvre, décédée en 1981, avait reçu le prix de l'académie Charles Cros (1963) et le grand prix de la chanson de la Sacem (1994).

Mes chansons préférées :P












Le poème d’espoir de Louis Aragon, écrit en hommage au poète républicain espagnol Federico Garcia Lorca, assassiné en 1936 par les milices franquistes.

Tout ce que l’homme fut de grand et de sublime
Sa protestation ses chants et ses héros
Au dessus de ce corps et contre ses bourreaux
A Grenade aujourd’hui surgit devant le crime
Et cette bouche absente et Lorca qui s’est tu
Emplissant tout à coup l’univers de silence
Contre les violents tourne la violence
Dieu le fracas que fait un poète qu’on tue
Un jour pourtant un jour viendra couleur d’orange
Un jour de palme un jour de feuillages au front
Un jour d’épaule nue où les gens s’aimeront
Un jour comme un oiseau sur la plus haute branche
Ah je désespérais de mes frères sauvages
Je voyais je voyais l’avenir à genoux
La Bête triomphante et la pierre sur nous
Et le feu des soldats porté sur nos rivages
Quoi toujours ce serait par atroce marché
Un partage incessant que se font de la terre
Entre eux ces assassins que craignent les panthères
Et dont tremble un poignard quand leur main l’a touché
Un jour pourtant un jour viendra couleur d’orange
Un jour de palme un jour de feuillages au front
Un jour d’épaule nue où les gens s’aimeront
Un jour comme un oiseau sur la plus haute branche
Quoi toujours ce serait la guerre la querelle
Des manières de rois et des fronts prosternés
Et l’enfant de la femme inutilement né
Les blés déchiquetés toujours des sauterelles
Quoi les bagnes toujours et la chair sous la roue
Le massacre toujours justifié d’idoles
Aux cadavres jeté ce manteau de paroles
Le bâillon pour la bouche et pour la main le clou
Un jour pourtant un jour viendra couleur d’orange
Un jour de palme un jour de feuillages au front
Un jour d’épaule nue où les gens s’aimeront
Un jour comme un oiseau sur la plus haute branche

Louis Aragon
"Ne change pas ta nature si quelqu'un te fait mal, prend juste des précautions.
Préoccupes-toi plus de ta conscience que de ta réputation.

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Re: Salut Jean

Messagepar gemini joli » Sam 13 Mars 2010 20:44

je ne connais pas aussi bien que toi Jean Ferrat, mais son oeuvre est magnifique.
j'aime sa chanson, tant politique que poetique (mais il avait suffisament d'intelligence pour ne pas mélanger les registres lors des emissions et interviews)...oui, grand poete et amoureux de la vie et des hommes.
Grande perte pour les vivants...mais tous les autres vont se régaler!!
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Re: Salut Jean

Messagepar Esmeralda » Dim 14 Mars 2010 12:05

Il ne l'a pas fait exprès, évidemment, il s'est éteint juste quand la vie s'est retirée de ses poumons malades, à l'hôpital de d'Aubenas, dernier souffle épuisé. Mais il est mort en compagnon de route. Lui, Jean Ferrat, 79 ans, l'un des rares sympathisants communistes de l'histoire de la chanson française. Il est involontairement mort en acteur tactique, la veille d'un dimanche d'élection. Histoire de donner un coup de pouce aux derniers communistes de la liste du Front de gauche, engagés dans la campagne des régionales, et de faire un peu honte à d'autres. Par le brusque réveil des mémoires que sa disparition provoque.

Mort ironique, on pourrait même dire: mort critique, même si l'homme était l'un des plus bons qui se soit trouvé, l'un des plus droits, assurent ceux qui l'ont connu; il n'aurait jamais insulté personne, aucun adversaire, aucun détracteur, les yeux dans les yeux. Mais mort, tout de même, qui va résonner, ce dimanche, bien au-delà du dernier carré, comme un reproche. Il devrait même y avoir des électeurs du Front National pour se sentir bizarres, en allant voter. Ou de l'UMP. Et puis des abstentionnistes. De ces seniors qui ne veulent plus entendre parler de la démocratie participative, et qui ont pris depuis longtemps l'habitude de ne plus se mêler de rien.

Car il a été un temps où ceux-là, ou bien leurs parents, dans les mêmes maisons, ou bien leurs profs, les voisins ou les collègues de bureau exprimaient des rêves, un idéal, des espérances à travers les chansons de Jean Ferrat. Où des gens de condition proches, Français simples, classe moyenne à peine montante, cultivaient encore le goût d'idées et de valeurs communes. De classe, selon le jargon d'alors. Même pays, même peuple. Années 60-70. Mêmes individus, souvent, que ceux qui vont aller à l'élection, séparés, fâchés, hostiles les uns aux autres. Oui, les mêmes. Jean Ferrat a été tellement consensuel, il s'est vendu tellement de ses disques que, forcément, son œuvre les recouvre tous un peu. Qu'une même matrice culturelle les unit, les réunit encore, même si c'est désormais dans l'amertume et les querelles identitaires.

Cela avait commencé avec Ma Môme. «Elle travaille en usine / A Créteil». Pour la première fois, au début des années 60, un chanteur mettait les pieds dans le plat de la sociologie nationale. Ils avaient été nombreux à se reconnaître. Tous ceux que la modernité d'après-guerre contraignait à quitter leurs campagnes pour se rapprocher des villes de l'ère industrielle. Les volontaires pour peupler cette nouvelle région d'avenir: l'Ile-de-France. Tous plus ou moins immigrés, ou fils de, de l'intérieur ou de l'extérieur, et qu'on logeait à la hâte dans des HLM, pressés par une croissance à 5% l'an et par les rebonds de la natalité.Ils n'en étaient pas revenus qu'on pût ainsi, dans des poèmes chantés, rendre hommage à leur quotidien sans gloire et à leur «poulet aux hormones» des jours fériés. Jean Ferrat affichait ouvertement des sympathies pour le PCF, on l'a tout de suite beaucoup vu, en septembre, à la «Fête de l'Huma». Mais tout le monde, en gros, s'en fichait. Soit parce qu'on votait soi-même communiste, ou qu'on avait encore voté «pour le parti», après la guerre, ou jusqu'à la crise de Budapest, en 1956. Soit parce qu'il était encore normal d'avoir des amis communistes.
http://www.ina.fr/art-et-culture/mode-e ... at.fr.html
Jean Ferrat avait le physique maigre des compagnons de route ou d'anciens militants d'alors. Comme l'écrivain Roger Vailland ou Montand. Joues creuses et large bouche. Des yeux illuminés par de possibles lendemains qui chantent. Mais sans la moustache de mousquetaire qu'on allait plus tard lui voir porter. Curieusement, alors qu'il était né à Vaucresson (Hauts-de-Seine), et avait passé son enfance à Versailles, sa voix trahissait déjà un homme de la montagne. Sa voix allait bien à la transhumance nationale. A ces destinées toutes métisses, à mi-gué, entre passé provincial et présent consenti de déracinés, entre l'oubli de la classe sociale d'origine de chacun, et les souvenirs encore vifs de celle-ci.

Ma France - «(...) il est temps que le malheur succombe»; Nuit et brouillard - «Je twisterai les mots s'il fallait les twister»; toutes les autres. La montagne, tube des tubes. Plus de deux cents textes ou musiques. Contre la droite gaulliste, puis contre le goulag soviétique et «le bilan globalement positif» de Georges Marchais. Une œuvre brève. En 1972, Jean Ferrat se retirait déjà dans son village d'Ardèche. Mais à longue portée.

Ses disques, même ceux des poèmes d' Aragon, se sont toujours énormément vendus pendant les trente ans qu'aura duré sa retraite. Jusqu'en 2009, où sa compilation atteignait encore les deux cent mille exemplaires. Sans doute parce ce que plus que ses amis ou ceux auxquels on l'associait par le talent, Brel, Ferré, Brassens, Jean Ferrat ne s'est jamais départi de sa position populaire. Il écrivait et chantait depuis le peuple, et le peuple lui en manifestait une gratitude tranquille et fidèle.

Qu'en reste-il aujourd'hui, d'une œuvre et du-dit peuple? A voir. Mais ce dimanche électoral, après 20 heures, quand vont se déchirer les héritiers rivaux, sur les plateaux de télévision, un fantôme, souriant et bienveillant, nous regardera sûrement en lissant sa moustache.
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Re: Salut Jean

Messagepar Jean-Claude Carton » Dim 14 Mars 2010 12:31

Comme j'ai la totalité des chansons de Jean Ferrat, j'envoie une autre fournée

Bonne écoute







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Re: Salut Jean

Messagepar Richard Khaitzine » Mar 16 Mars 2010 13:16

Salut Jean-Claude, et bonjour à nos ami(e)s
J'avais 14 ans en 1961 et déjà je me nourrissais des textes de Ferré et de Brassens quand j'entendis Jean Ferrat. Ce fut un choc, choc motivé tout autant par la chaleur de sa voix que par la qualité et la générosité de son écriture. J'étais convaincu qu'il irait loin et que ce ne serait pas facile dans une France de médias frileux soumis aux diktats de l'exécutif. J'achetai son disque... un 33 tours 25 cm. Ce disque, je l'ai toujours, même s'il "gratte" un peu à force d'être passé et repassé sur un électrophone Eden, le concurrent de Teppaz.
La suite n'a pas démentie ce que je pensais alors. Je n'ai jamais rencontré Jean Ferrat et ceci même si l'un de mes meilleurs amis, plus tard, était parent de Christine Sèvres, la première épouse de Jean.
Je n'appris que bien des années après 61 que nous avions les mêmes origines... Ah! ces juifs russes rebelles à toute autorité, aux idées toutes faites et au politiquement correct... tous des empêcheurs de danser en rond qui ne se satisferont jamais d'assister au déplorable spectacle de ce que certains hommes sont capables de faire à d'autres.
Alors, à quoi bon en rajouter. Je concluerais en disant simplement je t'aimais bien Jean et ... salut l'artiste.

Richard K.
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Re: Salut Jean

Messagepar Jean-Claude Carton » Dim 21 Mars 2010 07:48

Mardi 23 mars vers 0h45, dans Unis vers l'Uni, je rendrais hommage à ma façon à Jean Ferrat.
Des chansons jamais ou rarement diffusées dans les médias.
Histoire de ne pas faire comme les autres qui, pendant quelques jours et tandis qu'ils avaient fait l'impasse sur cet immense bonhomme, ont tenté de se racheter.
Z'avez remarqué ?
Une fois mort, tout le monde vous aime :mrgreen:
ou presque

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