"Je suis victime d’un État dont le Premier ministre est une femme. Et parce je suis allée un cran trop loin dans la dénonciation de la religion et de l’oppression des femmes, j’ai dû quitter mon pays. Des femmes se sont opposées à moi quand j’ai parlé des droits humains. Selon elles, Dieu ne reconnaît pas tant de droits à la femme. Mais j’ai rencontré dans mon pays des hommes qui réfutent ce que disent les textes religieux et qui croient à l’égalité. Cela ne dépend pas du sexe, mais de la conscience de chacun. Bien évidemment, on ne pourra pas compter sur les musulmanes qui sont contentes de porter le voile et de glorifier leur soumission pour améliorer le sort des opprimées. Tant qu’une société sera basée sur la religion, tant que la loi ne reconnaîtra pas l’égalité des sexes, la politique ne pourra pas faire avancer la cause des femmes.
S’il y avait égalité des hommes et des femmes devant la loi, on pourrait punir les intégristes lorsqu’ils commettent des crimes contre les femmes. Mais aujourd’hui les choses sont compliquées car le droit de la famille est fondé sur la religion, et comme la religion officielle est l’Islam, les intégristes prônent l’application de ce qui est écrit dans le Coran. Le gouvernement ne prend aucune mesure contre eux car cela reviendrait à s’attaquer à l’Islam. Si au lieu d’un droit islamique, on avait un droit séculier avec séparation entre Etat et religion, il serait plus facile de mettre ces criminels en prison et d’établir en pratique l’égalité entre hommes et femmes."
Taslima Nasreen